L'avenir de la CRPCEN en question

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vendredi 19 avril 2013

La compensation

                                  
    
           
              RÉFLEXION SUR LA COMPENSATION ENTRE LES RÉGIMES DE
                    BASE DE SÉCURITÉ SOCIALE ET DE RETRAITE




Préambule

Les mécanismes de compensation entre les régimes de base de sécurité sociale et de retraite, instaurés par la loi du 24 décembre 1974, suscitent des débats récurrents entre les partenaires sociaux du notariat, et plus particulièrement au sein du conseil d’administration de la CRPCEN.

Ces débats sont « mis en veille » lorsqu’en période de forte croissance économique les régimes débiteurs peuvent assumer la charge de la compensation sans mettre en péril leur équilibre financier.

Ils deviennent vifs et sont empreints d’incompréhension lorsque la CRPCEN est mise en difficulté alors que le niveau de ses cotisations sur salaires est supérieur à celui de certains régimes créditeurs.

Les perspectives économiques excluant avant longtemps des périodes de forte croissance, l’incompréhension précitée devient inquiétude pour l’avenir de la CRPCEN, régime autofinancé par la profession et ne pouvant supporter, compte tenu d’un faible niveau de ses réserves (moins de 6 mois de prestations), des déficits récurrents entraînant une menace sur sa capacité à faire face à ses obligations.

L’inquiétude devient réprobation lorsqu’est supprimée la compensation spécifique vieillesse entre régimes spéciaux, dans des conditions qui conduisent les partenaires sociaux du notariat à considérer que leur régime est victime de discrimination par les Pouvoirs Publics. En effet, cette suppression pour des raisons politiques avouées (liées à la CNRACL) a conduit l’Etat à assumer par son budget les conséquences sur l’équilibre financiers de certains régimes spéciaux (comme la SNCF) alors que la CRPCEN doit assumer seule ces conséquences pour elle-même.

Autrement dit, les partenaires sociaux du notariat ont le sentiment d’une « double peine » ou double charge : assumer par leurs cotisations sociales l’équilibre de leur régime, et assumer par leurs impôts l’équilibre de certains autres régimes spéciaux.

Le présent document analyse cette situation et avance des propositions.



Les différentes compensations

Après la suppression de la compensation démographique maladie et de la compensation spécifique vieillesse entre régimes spéciaux, il subsiste actuellement trois systèmes de compensation :

En assurance vieillesse :
- compensation démographique entre les régimes de salariés.
- compensation démographique entre les régimes de salariés et les régimes de non salariés.

En assurance maladie-maternité :
- compensation bilatérale avec le régime général de sécurité sociale.



La notion de solidarité

La nécessité d’une solidarité entre les régimes de base de sécurité sociale a été avancée par les initiateurs de la loi du 24 décembre 1974 pour justifier les mécanismes de compensation.

Cette solidarité est acceptée, dans son principe, par les partenaires sociaux du notariat.

Le débat tient à des mécanismes conduisant à des résultats incohérents, et au fait que la complexité technique de ces mécanismes génère une certaine opacité qui ne facilite pas la compréhension de la mise en œuvre du principe de solidarité.

En effet, la solidarité, au sens général, est selon le LAROUSSE « La dépendance mutuelle entre les hommes » et permet donc l’entraide pour faire disparaître les difficultés lorsqu’elles existent. Mais ce principe n’est pas correctement respecté lorsque les mécanismes qui sont censés le mettre en œuvre ne font pas disparaître les difficultés, mais substituent à celles des uns les difficultés des autres.

Appliquée au domaine qui nous préoccupe, on peut dire que la solidarité ne doit pas avoir pour objectif ni pour effet de contribuer à l’équilibre financier de certains régimes en créant ou aggravant des déséquilibres financiers dans d’autres régimes.
           
Certes, il faut pondérer ce principe par la nécessité :
- d’une égalité dans l’effort contributif.
- d’une exclusion, pour la comparaison, des prestations spécifiques à certains régimes pouvant être la cause des déséquilibres.

Cette pondération est très largement pratiquée à la  CRPCEN :

- pour ce qui concerne l’effort contributif, par la mise à niveau des cotisations réalisée par les décrets récents (mise à niveau qui a même conduit à aller au-delà la stricte égalité avec les régimes de droit commun : dépassement cumulé par les employeurs et les salariés de + 2,45 points).

- pour ses prestations spécifiques, du fait de leur couverture par une cotisation spécifique : la cotisation de 4 % sur les émoluments et honoraires, dont le produit dépasse très largement le montant de ces prestations spécifiques et contribue aussi à une partie du financement des prestations « de droit commun » lorsque ce financement est déséquilibré par le rapport démographique actifs/retraités.

Dans ce contexte les compensations en assurance vieillesse, à caractère démographique et limitées à un niveau de prestations commun à tous les régimes (prestation moyenne la plus faible des régimes compensés), paraissent s’inscrire correctement dans la notion de solidarité ci-dessus décrite, d’autant qu’elles ne sont pas affectées par les comportements individuels des affiliés.

Mais on verra que tel n’est pas le cas de la compensation bilatérale maladie.



                                   LA COMPENSATION BILATÉRALE MALADIE


Les mécanismes de cette compensation consistent à établir une sorte de « régime fictif » qui comporte :

1 – En recettes de la CNAM pour la CRPCEN : les dépenses maladie (prestations en nature seulement) versées en appliquant les règles du régime général.

A cet effet, les dépenses effectives de la caisse sont affectées d’un taux de correction défini à l’art. D 134-34 du code de la sécurité sociale qui permet d’en exclure celles correspondant aux spécificités du régime.

Il n’y a rien à redire sur ce volet.

2 – En dépenses de la CRPCEN pour la CNAM :
- 1 taux de cotisations appliqué aux dépenses d’assurance vieillesse (corrigées par un taux de pondération). Ce taux de cotisations, qui était à l’origine de 3,80 % a été ramené à 2,80 % en 2010 et est réduit progressivement pour disparaître en 2018. Ce taux ne pose donc pas de problème à la CRPCEN.

- 1 taux de cotisations appliqué à la masse salariale du notariat, affecté d’un taux de réduction pour tenir compte des dépenses de gestion administrative, du contrôle médical et de l’action sociale de la caisse.

Ce taux de cotisations, déterminé pour couvrir les prestations en nature de l’assurance maladie, est fixé conformément à l’article D 134-33 du code de la sécurité sociale, soit : taux appliqué par le régime général pour la couverture de ses prestations maladie-maternité. On verra que c’est ce taux qui pose problème à la CRPCEN.

Le montant du solde de compensation est égal à la différence entre recettes et dépenses ci-dessus définies : montant que reçoit la caisse s’il en résulte un excédent de recettes, et vice versa.

C’est logique puisque les recettes du régime fictif sont des dépenses de la caisse transférées à la CNAM, et les dépenses du régime fictif sont des cotisations de la caisse transférées à la CNAM. C’est en fait le principe d’une intégration financière.

L’application de ces mécanismes a pour conséquences :
1 – Une augmentation du solde créditeur pour la caisse (ou une diminution du solde débiteur) si les dépenses maladie transférées augmentent.
2 – Une diminution de ce solde créditeur (ou une augmentation du solde débiteur) si la masse salariale soumise à cotisations transférées augmente.

C’est le reproche que fait le notariat à ces mécanismes. En effet :
- d’une part, ils ont un effet pervers dans la mesure où l’augmentation des dépenses maladie génère des transferts positifs de compensation pour le régime spécial.

Autrement dit, un régime « vertueux » en termes de dépenses maladie se voit pénalisé et le système n’est pas incitatif à la modération de ces dépenses puisque leur augmentation est couverte par la solidarité.

- d’autre part, l’augmentation de la masse salariale ayant une incidence défavorable au régime spécial dans le calcul de la compensation, sont pénalisés les régimes couvrant des professions mettant en œuvre une politique salariale favorable. C’est un paradoxe dans la mesure où l’équilibre des régimes repose aussi sur une progression de la masse salariale.

Certes, il ne faudrait pas en déduire que les augmentations salariales sont inopportunes. Elles génèrent en effet pour le régime des recettes supérieures à leur incidence sur les soldes de compensation à la charge de la caisse. Il reste qu’en soi, le système est pervers.



                                       LA CRPCEN EST UN RÉGIME « VERTUEUX »


Déjà, par le caractère sérieux d’une gestion générant des coûts très modérés, la CRPCEN est un régime que l’on peut qualifier de vertueux.

Mais surtout, la CRPCEN (ou plus exactement le comportement de ses affiliés) a un caractère vertueux attesté par une dépense annuelle moyenne remboursée, par bénéficiaire de l’assurance maladie, sensiblement inférieure à celle du régime général : 2.157 € en 2011 pour la CRPCEN, contre 2.560 € pour le régime général, soit un écart en moins de 15,74 %. Notons à cet égard que l’année 2011 n’est pas une exception conjoncturelle : le constat est récurrent depuis de nombreuses années.

Et, précisions importantes :

- la dépense remboursée prend en compte, pour la CRPCEN, des taux de remboursement supérieurs à ceux du régime général ce qui signifie qu’une comparaison des dépenses effectives de santé des deux régimes augmenterait encore l’écart constaté.

- les montants indiqués incluent les indemnités journalières, exclues des calculs de compensation qui ne prennent en compte que les prestations en nature. Mais, sachant que les indemnités journalières de la caisse représentent 16 % du total des dépenses, et celles du régime général seulement 7 %, l’écart entre les deux régimes sur les prestations en nature relevant de la compensation est plus important que celui-ci-dessus indiqué.

Or, les mécanismes de la compensation bilatérale prenant en compte le taux des cotisations que le régime général applique pour couvrir ses propres dépenses, ils annulent de fait le bénéfice que devrait retirer la CRPCEN du comportement vertueux de ses bénéficiaires.

Autrement dit, ce qui est économisé en dépenses de santé est versé en dépenses de compensation.

L’effet pervers est conséquent car, alors que la modération des dépenses de santé est largement dépendante du comportement des patients, l’annulation de leurs efforts par des mécanismes techniques et opaques a forcément un effet contre productif.

Sachant que la spécificité d’un régime est un ensemble incluant prestations et cotisations, mais aussi un lien qui unit des personnes en générant de leur part un comportement responsable, on peut soutenir que par leurs effets pervers les mécanismes de la compensation bilatérale maladie peuvent conduire à une remise en cause de fait de cette spécificité. Et ce alors même que le gouvernement, dans son document d’orientation du 10 octobre 2007 en vue de la réforme des régimes spéciaux, s’est engagé au respect des spécificités de ces régimes en ces termes : « Il ne s’agit pas de nier les spécificités des métiers, ni des missions de service public qui sont accomplies. Ces spécificités demeureront ».

Dès lors, toute la communication que s’efforce de faire la CRPCEN pour la modération des dépenses de santé peut, par voie de conséquence, s’en trouver mal perçue et donc rendue inefficace.

Pire encore, on peut craindre que dans le cadre d’une information exhaustive et transparente, à laquelle ont droit tous les ressortissants du régime, la compensation apparaisse contre-éducative.


Précision nécessaire

L’objectivité commande de ne pas attribuer au seul comportement vertueux des assurés du notariat les écarts de dépenses de santé.

Ce phénomène est en partie dû, également, au fait que la population couverte par la CRPCEN est sans doute, de part la nature de l’activité, moins « à risques » que celles couvertes par le régime général, et bénéficie globalement d’un meilleur état de santé. Mais on peut soutenir également que la CRPCEN, par des remboursements plus élevés que ceux du régime général, contribue de meilleure manière au maintien de ce bon état de santé. Même si le notariat n’échappe sans doute pas à la progression des maladies générées par le stress au travail.

En tout état de cause, il reste incontestable que, pour une part importante, c’est le comportement vertueux des assurés de la CRPCEN qui est source de moindres dépenses pour le régime.

Il ne serait pas incompatible avec la notion de solidarité ci-dessus décrite, que cet élément soit pris en compte pour les calculs des soldes de la compensation bilatérale maladie.



                                                           PROPOSITIONS


L’analyse qui précède conduit à faire des propositions à trois niveaux :


1 – Mécanismes de la compensation bilatérale maladie

Prendre en compte, dans les mécanismes de calculs, la part d’économies de dépenses de santé générée par le comportement « vertueux » des assurés de la CRPCEN.

La difficulté est sans doute de parvenir à mesurer cette part, mais elle devrait pouvoir être résolue dès lors que dans des rendez-vous antérieurs au cabinet du Ministre chargé de la santé, le projet en avait été avancé par ce ministère.

Un forfait en pourcentage pourrait sans doute être déterminé et appliqué aux soldes résultant des mécanismes actuels (par analogie à ce qui fut pratiqué pour la compensation spécifique vieillesse).

Au moment où les Pouvoirs Publics envisagent une réforme des systèmes de compensation, le notariat demande la prise en compte de la présente requête.


2 – Prise en compte de la suppression de la compensation spécifique vieillesse

Comme indiqué dans les développements qui précèdent, la CRPCEN est discriminée dès lors que pour d’autres régimes spéciaux, le manque à gagner a eu pour contre partie une contribution de l’Etat… mais rien pour la CRPCEN.

Cette compensation, crée à partir de 1986, a été pendant 25 ans un élément de l’équilibre financier du régime, pris en compte dans toutes les projections actuarielles, qui fait aujourd’hui d’autant plus défaut que le contexte économique est dégradé et, semble-t-il, durablement.

Sa suppression a généré, au regard des dispositions d’origine, un manque à gagner annuel pour la CRPCEN de l’ordre de 85 à 90 millions d’euros (valeur 2010).

Il n’est donc pas illégitime de demander, qu’à l’instar d’autres régimes spéciaux, une contre partie en recettes soit envisagée par un processus à convenir, mais sans générer d’augmentation de la charge des cotisations des employeurs et des salariés, mises à niveau et même au-delà.


3 – Principe de non rupture de l’équilibre financier du régime

La réglementation relative à la compensation ne devrait pas conduire au déséquilibre d’un régime autofinancé comme la CRPCEN :
- qui fait l’effort contributif nécessaire.
- et qui finance ses prestations spécifiques par une cotisation particulière.

Un principe limitant les soldes de compensation aux excédents des régimes débiteurs qui satisfont à leurs obligations de financement devrait être inscrit dans les textes pour ne pas mettre ces régimes en péril.

C’est la demande formulée pour la CRPCEN.

Le complément de solidarité éventuellement nécessaire relève de la Nation et non des régimes de sécurité sociale et devrait donc être pris en compte par le budget de l’Etat.

  

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